Polarama – David GORDON

Ne nous voilons pas la face, Harry Bloch est un looser. Incapable d’écrire sous sa véritable identité, il multiplie les pseudonymes lui permettant d’assumer les romans de science fiction, érotiques et autre sagas de vampires à tendance SM qu’il écrit pour manger. Sa femme, Jane, l’a quitté pour un écrivain reconnu. Et c’est Claire une gamine de 16 ans - pour laquelle il rédige des dissertations - qui lui sert d’agent. Mais la reconnaissance, la gloire et l’argent facile semble enfin à sa porté lorsqu’il reçoit la lettre du tueur en série, Dorian Clay, fan du Harry auteur de romans pronos, qui lui explique l’avoir choisi pour écrire ses mémoires quelques mois avant son exécution.

Globalement ce premier roman m’a beaucoup plu. J’aime bien la plume de David Gordon, simple, percutante voir un peu dérangeante, les personnages sont réussis et leurs relations très intéressantes (bonjour les platitudes !). Polarama se lit d’une traite et avec une attention certaine.

Mais ce qui m’a le plus captivé c’est la réflexion de cet auteur sur ce que certains considèrent comme de la sous-littérature ou tout du moins littérature de seconde zone ; Mais si vous voyez, ceux qui pensent que les San Antonio et autres Harlequin sont à la littérature ce que Patrick Sébastien est à la musique. En effet, par le biais de son narrateur et de son expérience des écrits populaires (dont plusieurs extraits sont d’ailleurs habillement insérés dans l’intrigue), David Gordon nous dévoile (pour ceux qui comme moi ne se posent pas de question quand ils lisent) les attentes d’un Lecteur. Soulignant que dans ses romans, Harry Bloch, cherche juste à y répondre de la manière la plus simple et la plus primaire qu’il soit. De façon plus générale l'auteur s'appuie avec humour et cynisme sur la toute la culture populaire américaine (série, ciméma...) permettant à monsieur tout-le-monde de se fantasmer en détective chevronné : "Who are you? Who, who, who,who?" (Générique des experts les gars!)

Un petit bémol quand même. Ne perdons pas de vu que Polarama reste un vrai thriller avec des meurtres (un peu gores, âmes sensibles s’abstenir), une enquête, le FBI, une stripteaseuse et tout et tout… Et si oui on peut dire ‘Han je l’avais pas vu venir !!’ quand on découvre qui est le coupable, c’est pour la simple et bonne raison bah qu’aucun indice ne pouvait nous mettre sur la voie. Et ça, ça m’a quand même bien énervée.

En bref, Polorama est un roman malin, un peu déjanté et surtout unique en son genre.

"Pourquoi lit-on? Au tout début, dans l'enfance, qu'est-ce qui fait qu'on adore tel ou tel livre? Je crois que pour la plupart des gosses, c'est une question de voyage, d'aventure, de rêve, qui pourraient être les leurs. Mais pour quelques autres, il s'agit de s'échapper, de fuir l'ennui, le malheur, la solitude, le lieu ou la personne qu'ils ne supportent plus. Quand moi je lis, les mots imprimés sur la page remplacent ma voix intérieure et je cesse, l'espace d'un instant, d'être moi, ou du moins d'être si péniblement conscient d'être moi. Ainsi sont les vrais lecteurs, les mordus, ceux qui se défoncent à la fiction comme les toxicos à l'héro, qui aiment la littérature comme les amants aiment leur moitié : à en perdre la raison."

Polarama - David Gordon - 403 pages - Actes Sud

Premier essai transformé.

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