Voyage, Voyage...

Une vie à coucher dehors - Sylvain Tesson

Asphalte meurtrière en Géorgie, statuette tentatrice en Afghanistan, sirène sur la mer Egée ou encore tribulations d'une particule en Inde...Voici quelques endroits où ce recueil de 15 nouvelles nous transporte. Leurs points communs : l'Homme et la nature, ou plutôt comment face à cette dernière nous sommes bien peu de chose.

Sylvain Tesson est un aventurier, un vrai ! Il a fait fait le tour du monde à vélo, chevauché les steppes d'Asie Centrale, gravit l'Hymalaya etc...! Bref le mec que j'amerais être si j'étais courageuse...Et si j'étais un mec aussi...

Ce recueil de nouvelles est une bonne entrée en matière pour découvrir cet auteur-voyageur prolifique. C'est un régal! Ces 15 fictions sont remarquablement bien écrites avec une chute qui ne laisse jamais insensible. Ici Sylvain Tesson nous présente une nature rugueuse, sauvage qui place l'Homme dans un isolement le mettant face à lui-même... Il réussi habilement à mettre en exerge les problèmes des notre société moderne - l'élevage intensif, l'urbanisation ou encore la violence faite aux femmes pour n'en citer que quelqu'uns - dans différents endroits du monde où le temps semble pourtant s'être arrêté. Ces nouvelles deviennent alors intemporelles, comme un éternel recommencement (celle intitulée 'la particule' en est l'illustre exemple). L'auteur pose un regard à la fois critique et bienveillant sur cet Homme moderne, qui cherche sa place dans un monde qui ne contrôle plus très bien.  Bref un gros coup de coeur pour cet ouvrage que je vous recommande vivement!

"Chaque innovation a son inconvénient, mais chaque inconvénient sa réponse. L'immobilité rendait fous les cochons ? Je les shootais aux anti-dépresseurs. L'ammoniaque du lisier leur infectait les poumons ? Je mélangeais des antibiotiques à leur ration. Il n'y avait rien qui n'eût sa solution. Et ce qui n'avait pas de solution n'était pas vraiment un problème. Les porcs étaient engraissés pendant vingt semaines. Les pelletées de granulés moulus que je balançais dans les salles pleuvaient sur leur dos roses. La poudre se prenait dans leur soies. Ils avaient pris l'habitude de se secouer pour faire retomber la farine alimentaire. Il parait que l'homme s'habitue à tout. Le cochon, non."

Une vie à coucher dehors - Sylvain Tesson - 206 pages - Folio